La
Révolution reconnaît, le 15 avril 1792, la nécessité
pour les fonctionnaires de porter des signes distinctifs indiquant le
genre d'autorité dont ils sont revêtus. La Convention, avant
de se séparer, et après bien des discussions, avait réglé,
par le décret du 23 brumaire an IV (25 octobre 1795) les costumes
qui seraient portés après elle, par le Directoire.
Les cinq Directeurs avaient reçu un costume ordinaire (habit nacarat - c'est-à-dire rouge clair entre cerise et rose - doublé de blanc et brodé or, gilet long, blanc, brodé or, écharpe en ceinture, à franges d'or, pantalon collant, le tout en soie, chapeau noir retroussé d'un côté, à panache tricolore, épée et baudrier nacarat) et, pour les fêtes nationales, un grand costume, avec habit bleu et, en plus, un manteau nacarat. Le costume ordinaire des Directeurs avait été attribué aussi aux ministres (avec habit, chapeau et baudrier noirs, doublure de l'habit, pantalon, veste et panache ponceau - rouge proche du coquelicot - écharpe blanche et broderies en soie de couleur), aux secrétaires du Directoire (tout en noir, avec au chapeau, une plume rouge parmi les noires), aux messagers d'État (avec veste blanche ceinture et pantalon blancs, manteau court bleu à revers rouges, une plume blanche, panachée de bleu et de rouge au chapeau), enfin aux huissiers (en noir, avec ceinture rouge). Les représentants du peuple, dans sur grand élan d'anticomanie, s'étaient vu attribuer sur grand manteau-toge, en lainage rouge orné de palmettes bleues, et une toque bleue, à porter avec une longue tunique blanche, à laquelle ils avaient finalement substitué, par le décret du 19 novembre 1797, un habit bleu, plus courant et plus pratique. Dès son arrivée au pouvoir, le Consulat décide donc lui aussi de ses costumes, qui sont réglés par la loi du 3 nivôse an VIII (24 décembre 1799). Les consuls, à qui la loi laissait le choix de leur tenue, optent pour un habit de cérémonie rouge, couleur de la souveraineté, et brodé d'or, avec un pantalon collant blanc, une haute ceinture bleue, de courtes bottes noires, un bicorne galonné d'or et, pour l'usage courant, pour un habit bleu à ceinture rouge. Avec des pantalons blancs et des ceintures opposées de ton, les ministres ont aussi deux habits, l'un rouge et l'autre bleu, brodé en argent de feuilles de chêne, et les conseillers d'État un habit bleu foncé à broderies blanches tandis que leur secrétaire général a un habit noir à broderies noires. Les sénateurs choisissent un habit de drap ou de velours bleu, brodé or et une veste en drap d'argent brodé. Les membres du corps législatif reçoivent un habit fermé, bleu national, à collet et parements brodés en or, avec ceinture tricolore à frange d'or et chapeau français à glands d'or. Ceux du tribunat ont le même mais avec broderies, frange et glands d'argent. Cette loi est bientôt suivie d'une trentaine de décrets et arrêtés attribuant des uniformes aux fonctions les plus diverses. Le préfet de police portera un habit bleu, une veste et un pantalon rouges, avec broderies d'argent, écharpe blanche à frange d'argent, et chapeau français garni d'argent. Les maires auront un habit bleu avec une ceinture rouge à frange tricolore. Ceux qui sont à la nomination du premier consul se distingueront par trois rangs de liséré argent à leur habit et des boutons d'argent. Les gens de justice, après avoir eu pour les cérémonies publiques des vêtements noirs, avec un manteau court dont les broderies différaient selon les tribunaux, retrouveront en 1802, pour les audiences, un costume long comprenant une simarre (soutane) et une toge (manteau), ceinture et toque, dont les matières (soie ou laine) et les couleurs (noire ou rouge) permettent de distinguer le tribunal auquel chacun appartient. Les costumes des universités ne seront réglés, de la façon dont ils le sont encore aujourd'hui, qu'en 1808, mais les proviseurs, les professeurs et les membres des conseils d'administration des lycées, à partir de 1802, devront être en habit noir et manteau noir jeté en arrière, la présence ou l'absence de broderies (noires ou vertes) indiquant les grades. Les élèves devront être en habit, veste et culotte bleus, à collet et parements bleu céleste, avec un chapeau rond jusqu'à quatorze ans et un chapeau français ensuite ; les boutons seront en métal jaune, avec, inscrits dessus " lycée ", et le nom du lieu. L'année d'après, les écoles communales secondaires verront aussi leurs costumes réglementés: habit et chapeau noirs pour les professeurs, avec broderie en soie noire pour les directeurs, habit et redingote de drap vert à boutons blancs, avec inscrits dessus " école secondaire " et le nom du lieu, pour les pensionnaires. Les services des Ponts et Chaussées, des Forêts, de la Navigation, des Contributions directes, de la Comptabilité nationale, de la Poste aux chevaux, de la Poste aux lettres, les chefs des comptoirs dans l'Inde, même les commissaires-priseurs vendeurs de meubles, comme les ecclésiastiques en ville se voient aussi dotés d'un uniforme. Enfin, n'oublions pas que c'est à l'arrêté du 8 messidor An VIII (27 juin 1800) que les membres de l'Institut doivent leur célèbre " habit vert", en réalité noir brodé de vert, qui, avec quelques modifications de coupe nécessitées au cours des temps par les changements de mode, est parvenu jusqu'à nous. Créés avant 1802, tous les habits sont encore des habits dégagés, à revers assez larges, du type de ceux que l'on portait à la ville depuis le Directoire. Mais à partir de 1802, les décrets et arrêtés prescrivent l'habit français (c'est-à-dire aux bords fuyants, comme ceux du temps de Louis XVI) et l'on constate, dans les livres de comptes du brodeur Picot, que les clients possesseurs d'uniformes exécutés antérieurement font mettre à la française leur habit dégagé. A partir de cette date en effet s'affirme la volonté de retourner à l'usage de costumes de cour dans l'ensemble desquels pourraient s'intégrer tous ces uniformes de fonction. |